jeudi 12 juillet 2018

Billet 4 : Amélioration continue des pratiques pédagogiques


L'alignement pédagogique, la proposition d'évaluer les apprentissages en situation authentique et la rétroaction sont trois outils pédagogiques qui peuvent contribuer à améliorer la qualité de l’enseignement et favoriser de meilleurs apprentissages. Dans mon cas spécifique, les trois outils ont instinctivement été utilisés, mais un usage plus systématique et formalisé me permettrait d’en tirer davantage de bénéfices. 

Premièrement, en formation documentaire l’alignement pédagogique s’effectue naturellement autour de la demande du professeur disciplinaire. Une approche plus globale et disciplinaire comme le suggère  Biggs et Tang (2011) pourra bonifier les apprentissages. En effet, les auteurs proposent de considérer les objectifs du cours et ceux du programme universitaire. Gérard propose d’alignement pédagogiquement les objectifs, les activités d’apprentissage et d’évaluation sur les niveaux cognitifs visés. Ces deux stratégies pourront favoriser la cohérence du dispositif d’apprentissage. 

Une fois les contenus et les objectifs d’apprentissage définis, j’identifie les activités d’apprentissage et d’évaluation qui pourront le mieux en permettre l’apprentissage. À cet effet, les paramètres proposés par Nizet, Leroux, Deaudelin, Béland, et Goulet (2016) pour définir une situation d’évaluation et de pratique évaluative pourront contribuer à formaliser cette réflexion, en explicitant le contexte, les modalités, la médiatisation et la médiation relationnelle. Puis, un exercice simple, mais systématique d’alignement pédagogique des objectifs, des activités d’apprentissage et d’évaluation sur les niveaux cognitifs visés comme suggéré par Gérard (2015, 25 août) pourra aussi favoriser la cohérence pédagogique.

Deuxièmement, la proposition d'évaluer les apprentissages en situation authentique semble représenter  un idéal pour plusieurs auteurs en éducation (Clark, Dessus, & Marquet, 2009; Duval & Pagé, 2013; Nizet et al., 2016; Prégent, Bernard, & Kozanitis, 2009). Comme le contexte peut le rendre difficile à opérationnaliser, certains praticiens la considèrent comme « un modèle idéal qui doit orienter la réflexion et les pratiques » (Blozaire, 2014, p. 32). Cette inspiration plus libre peut mieux convenir au contexte changeant et atypique de la formation documentaire.

Troisièmement du côté de la rétroaction, à la lumière du texte de Rodet (2000), je constate que mes pratiques peuvent aussi être bonifiées. L’auteur identifie 4  types de rétroaction permettant d’accompagner adéquatement l’étudiant : une rétroaction sur l’appropriation cognitive de la matière proposée; sur l’appropriation méthodologique de la tâche à réaliser; sur l’appropriation métacognitive lors de la réalisation de la tâche; ainsi qu’un support affectif et motivationnel de l’étudiant. Les deux premiers types de rétroactions sont mes pratiques les plus courantes et en lien avec la matière que j’enseigne. Tandis que l’enseignement des processus métacognitifs est souvent fait oralement, en décrivant aux étudiants comment je réfléchis une problématique. Cependant, les étudiants ne sont pas formés et ne reçoivent pas de rétroaction sur leur propre pratique de métacognition. Enfin, le support affectif et motivationnel de l’étudiant constitue un thème que j’ai moins exploré et qui mériterait de l’être. Kozanitis (2017) fait valoir qu’elles exigent une personnalisation et un ajustement de la rétroaction, mais offre un accompagnement motivationnel conférant davantage de valeur à la rétroaction. Dans le temps imparti et au nombre d’étudiants que je rencontre, je devrai réfléchir à quelle forme pourrait prendre ce type de rétroaction.

Finalement, je considère qu’en pédagogie il y a constamment place à l’amélioration. L'alignement pédagogique, la proposition d'évaluer les apprentissages en situation authentique et diversifier les types de rétroaction constituent des pistes que je compte explorer en temps opportun.

Références
Biggs, J. B., & Tang, C. (2011). Teaching for quality learning at University (3e éd.). Londres, Royaume-Uni: The Society for Research into Higher Education & Open University Press.

Blozaire, P. (2014). Les  compétences et connaissances en évaluation des  apprentissages : état des lieux   Repéré à  https://www.usherbrooke.ca/pedagogie/fileadmin/sites/pedagogie/MPES-DPES/Paul_Blozaire.pdf

Clark, R., E., Dessus, P., & Marquet, P. (2009). À la recherche des ingrédients actifs de l’apprentissage. Distances & Savoirs, 7(1).

Duval, A.-M., & Pagé, M. (2013). La situation authentique : de la conception à l'évaluation : une formule pédagogique pour toutes les disciplines (1re éd.). Montréal, QC: Association québécoise de pédagogie collégiale.

Gérard, L. (2015, 25 août). L’alignement pédagogique: un concept clé en pédagogie universitaire.   Repéré le  2018-05-18, à  http://cooperationuniversitaire.blogs.docteo.net/2015/08/25/lalignement-pedagogique-le-concept-cle-en-pedagogie-universitaire/

Kozanitis, A. (2017). La rétroaction : outil d’information, de formation et de motivation Repéré le  2018-07-04, à  https://www.moodle2.uqam.ca/coursv3/pluginfile.php/2299383/mod_page/content/21/Retroaction.pdf

Nizet, I., Leroux, J. L., Deaudelin, C., Béland, S., & Goulet, J. (2016). Bilan de pratiques évaluatives des apprentissages à distance en contexte de formation universitaire. Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur, 32(2).

Prégent, R., Bernard, H., & Kozanitis, A. (2009). Enseigner à l'université dans une approche-programme : guide à l'intention des nouveaux professeurs et chargés de cours. Montréal, QC: Presses internationales Polytechnique.

Rodet, J. (2000,). La rétroaction, support d'apprentissage? Distances & Savoirs, (482).

lundi 9 juillet 2018

Billet 3 : Analyse SWOT du tutorat.


Certaines conditions peuvent être réunies ou évitées pour favoriser l’établissement d’une relation tutorale aidante. Une analyse de type SWOT (ou FFOM en français : forces, faiblesses, opportunités, menaces) permet au tuteur de s’approprier la littérature sur le sujet afin de réinvestir ces connaissances dans sa pratique. Les différentes conditions recensées sont présentées sous la forme classique de cette analyse au tableau 1.

Parmi ses forces, le tuteur doit démontrer la solidité de ses connaissances (cognitives) liées au contenu du cours. Il doit aussi montrer qu’il connait bien les processus à réaliser pour se les approprier, comme la nature des travaux demandés ou les objectifs des évaluations à venir. L’enseignant doit aussi être en mesure d’assurer un accompagnement métacognitif auprès de l’étudiant. Par des questions ou des exemples, l’étudiant doit sentir qu’il s’approprie le processus d’apprentissage et qu’il gagne en autonomie dans ce rôle. Puis, Baudrit (2000) nomme la capacité de « congruence cognitive » (Depover, Baron, Lièvre, & Peraya, 2011, p. 112)  comme force recherchée chez le tuteur. Il s’agit de sa capacité à partir des connaissances de l’apprenant pour en construire de nouvelles, ainsi qu’à s'adresser à l'étudiant dans un langage qu'il comprend bien. Avoir le sentiment d’avoir bien compris renforce le sentiment d’efficacité personnel et le sentiment de compétence. 

Certaines faiblesses sont à éviter chez le tuteur. Premièrement, le tuteur doit être en mesure de créer un lien avec l’étudiant. Une faiblesse à la fonction de tutorat apparaît, si le tuteur ne sait se rendre suffisamment disponible au moment qui convient à l’étudiant et par des moyens qui lui paraissent raisonnables. Deuxièmement, le tuteur doit être en mesure de juger le besoin de rétroaction de l’étudiant, afin que cette information appuie l’apprentissage de l’étudiant au bon moment, en quantité suffisante, mais gérable pour l’étudiant. Cette modulation de l’information fournie répond au besoin cognitif de se sentir soutenu, mais non pas submergé (Depover et al., 2011), ainsi qu’au besoin affectif, motivationnel et de confiance en soi de l’étudiant (Burton et al., 2011). Troisièmement, l’incapacité du tuteur à se mettre à la place de l’étudiant peut causer des lacunes importantes dans la relation d’aide et l’apprentissage métacognitif requis. Certains auteurs suggèrent d’expérimenter le rôle de l’apprenant pour mieux comprendre l’expérience d’apprentissage en question (Depover et al., 2011, pp. 112, 161 ).

Différentes opportunités contribuent à établir une bonne relation de tutorat. Il convient au tuteur d’être proactif en initiant le contact avec l’étudiant, en vérifiant les connaissances de l’étudiant quant aux processus prévus de l’apprentissage (échéanciers, objectifs, le temps à investir, les ressources à sa disposition, etc.). Il revient aussi au tuteur de prendre connaissance des objectifs personnels et des attentes de l’étudiant et de réfléchir à comment le cours peut y répondre. Encore, il reste de la responsabilité du tuteur de réitérer cette information au cours de l’apprentissage, lorsque le contexte s’y prête, soit en temps opportun.

Enfin, le tuteur doit identifier et gérer les menaces à l’apprentissage, comme la propension à certains étudiants à ne pas demander ou ne pas vouloir d’aide (Depover et al., 2011). Il doit constater cette attitude lorsqu’elle survient et tenter d’accompagner l’étudiant dans l’identification de cette attitude. Une autre menace identifiée dans la littérature se situe au niveau des contraintes organisationnelles. Coppola et ses collègues en 2001 (Depover et al., 2011, p. 111) ont identifié surtout le manque de temps pour analyser les productions de l’étudiant, identifier ses lacunes, les causes de celles-ci et développer des processus d’apprentissage mieux adaptés. Or, le tutorat constitue un engagement envers l’étudiant et ne doit pas plier devant cette menace. Le tuteur doit fournir les efforts nécessaires, comme travailler tard le soir ou sous pression, afin de fournir les rétroactions dont l’étudiant a besoin. 

Ainsi, cette revue non exhaustive de forces, faiblesses, opportunités et menaces qui guettent le tutorat met en évidence le caractère exigeant, mais aussi très sensible et humain de ce rôle. Puis, c’est sans doute dans l’investissement du tuteur dans son rôle qu'il atteint ses propres objectifs et une satisfaction professionnelle.

Tableau 1
Analyse SWOT du tutorat.
Forces
Faiblesses
  • Connaissances cognitives
  • Connaissances procédurales
  • Pratiques métacognitives 
  • Faire le lien en objectifs personnel de l’étudiant et les objectifs du cours
  • Congruence cognitive (Baudrit, 2000), soit la capacité à partir des connaissances de l’apprenant et à communiquer dans un langage que l’étudiant comprend facilement.

  • Ne pas offrir suffisamment de rétroactions
  • Ne pas offrir les rétroactions au bon moment
  • Ne pas être en mesure de créer un lien affectif avec l’étudiant
  • Ne pas avoir expérimenté soi-même la formation à distance (Deschamps, 2006; Glikman, 2002)
Opportunités
Menaces
  •  Initier l’accueil de l’étudiant (Wion et Gagné, 2008)
  • Établir un échéancier de rencontre en fonction du déroulement du cours
  • Prendre connaissance des attentes des apprenants
  • Offrir régulièrement son aide
  • Ne pas demander de l’aide
  • Ne pas être suffisamment explicite sur l’aide que le tuteur peut offrir
  • Conditions organisationnelles, comme les délais impartis sont plus ou moins adaptés au développement d’une bonne relation tutorale  (Coppola et al, 2001)
Source.  Depover, C., Baron, G. L., Lièvre, B. d., & Peraya, D. (2011). Le tutorat en formation à distance. Bruxelles: De Boeck.

Référence
Burton, R., Borruat, S., Charlier, B., Coltice, N., Deschryver, N., Docq, F., & Eneau, J. (2011). Vers une typologie des dispositifs hybrides de formation en enseignement supérieur. Distances et savoirs, 9(1), 69–96.

Depover, C., Baron, G. L., Lièvre, B. d., & Peraya, D. (2011). Le tutorat en formation à distance. Bruxelles: De Boeck.

mardi 22 mai 2018

Billet 2 : Alignement pédagogique et la rédaction des objectifs d'apprentissage


Comme le mentionne Gérard (2015, 25 août) : « L’alignement pédagogique c’est le concept de base en pédagogie universitaire, la base de la base, le minimum syndical. ». 

Souvent, en tant qu’enseignante, je suis inventive et prolifique pour imaginer des activités d’apprentissage. Par ailleurs, rédiger les objectifs d’apprentissage me semble une tâche plus obscure et rarement traitée. Pourtant, la cohésion de l’enseignement repose sur l’objectif d’apprentissage. Aussi, pour me rafraichir la mémoire, et peut-être la vôtre aussi, ce billet traite de la rédaction des objectifs d’apprentissage.

Legendre définit l’objectif d’apprentissage comme précisant « les changements durables qui doivent s’opérer chez le sujet, pendant ou suite à une situation pédagogique » (Legendre, 2005, p. 946). Aussi, pour constater l’atteinte de cet objectif, il faut observer ces changements durables. L’évaluation remplit cette fonction.

Des objectifs d’apprentissage clairs et circonscrits permettent à l’enseignant d’annoncer les intentions en quantité et en qualité de travail attendu (Richard, 2016). L’objectif d’apprentissage donne du sens à l’enseignement proposé. L’étudiant peut orienter son écoute, ses intentions d’apprentissage et ses activités d’apprentissage. L’objectif d’apprentissage permet aussi équité et transparence en regard de l’évaluation (Fontaine, 1989).

L’objectif général est simplement composé d’un verbe à l’infinitif et d’un complément thématique. Le verbe doit correspondre au niveau cognitif visé selon la taxonomie de Bloom (Université Laval, 2018). Il oriente l’intention d’apprentissage.

L’objectif spécifique exige davantage de précision. Encore formulé à l’aide d’un verbe à l’infinitif et d’un complément, il s’adresse à l’étudiant (Université Laval, 2018). Il décrit un comportement observable et peut même être précisé par des indicateurs; de façon à ce que son observation ne porte pas à interprétation et soit univoque. L’objectif spécifique précise les conditions de réalisation de l’observation. Aussi, doit-il être bien aligné sur l’objectif général et le contexte d’apprentissage.
Cet alignement demande de prendre en compte le caractère réaliste des objectifs d’apprentissage selon le contexte d’apprentissage. Pour alimenter cette réflexion, les conditions nommées pour l’application de stratégies d’apprentissage, temporelles, environnementales, matérielles et de ressources  (Bégin, 2008) peuvent être mises à profit. 

Ainsi, la formalisation de l’objectif d’apprentissage est relativement simple. Cependant, il s’agit d’une tâche très qualitative qui doit être menée avec justesse. Là se situe la complexité de rédiger les objectifs d’apprentissage. Cette tâche mérite une réflexion approfondie, ou même un échange entre pairs, voire une consultation des acteurs impactés. 

Pour le chargé de cours, l’approche par programme définit généralement d’emblée les objectifs généraux du cours. Il lui revient d’arrimer les objectifs spécifiques en fonction des activités d’apprentissages et d’évaluation qu’il propose.

Lorsque je porte mon chapeau de bibliothécaire, l’alignement tant des objectifs d’apprentissage, des activités et de l’évaluation requiert beaucoup de concertation et de collaboration. Mon enseignement étant intégré dans le cours d’un autre enseignant, je dois connaître les activités que les étudiants auront à réaliser et, surtout, comment ils seront évalués. Ainsi, je peux mettre les accents sur les notions les plus importantes, ainsi que les faire pratiquer davantage les aspects qui contribueront à leur évaluation. 

Puis à l'avenir, je vais m'efforcer de formaliser l'analyse de l'alignement pédagogique. Les exemples de Gérard (2005) me paraissent simples, permettant une analyse minimale.

Références
Bégin, C. (2008). Les stratégies d’apprentissage : un cadre de référence simplifié. Revue des sciences de l’éducation, 34(1), 47-67.

Fontaine, F. (1989). Les objectifs d'apprentissage (3e éd.). Montréal, QC: Université de Montréal, Service pédagogique.

Gérard, L. (2015, 25 août). L’alignement pédagogique: un concept clé en pédagogie universitaire.   Repéré le  2018-05-18, à  http://cooperationuniversitaire.blogs.docteo.net/2015/08/25/lalignement-pedagogique-le-concept-cle-en-pedagogie-universitaire/

Legendre, R. (2005). Dictionnaire actuel de l'éducation (3e éd.). Montréal, QC: Guérin.

Richard, J.-F. (2016). La rédaction d’objectifs d’apprentissage :  principes, considérations et exemples. Moncton, NB: Commission de l’enseignement supérieur des Provinces maritimes.

Université Laval. (2018). Les objectifs d’apprentissage.   Repéré le  2018-05-18, à  https://www.enseigner.ulaval.ca/ressources-pedagogiques/les-objectifs-d-apprentissage

Billet 4 : Amélioration continue des pratiques pédagogiques

L'alignement pédagogique, la proposition d'évaluer les apprentissages en situation authentique et la rétroaction sont trois outi...